Sur le bout de la langue s02E01
25January2024

Sur le bout de la langue s02E01

On parle de France Travail, de phénomène phonétchique, de distinction 2.0 et de Namedrops...

Édito -

La marque France (au) Travail

“La marque pays, c'est une identité nationale rendue tangible, solide, transmissible et utile”, affirme Simon Anholt. A ce titre, la France est bien une marque, aux couleurs, devise, typographies déposées à l’INPI, chartée donc graphiquement mais aussi dotée d’une grammaire de marque qui tend à devenir toujours plus lisible pour ses communautés, c’est-à-dire toutes les citoyennes & tous les citoyens.

Dans cette mue progressive, le changement de « Pole Emploi » en « France Travail » répond au cahier des charges de l’architecture de marques hexagonale où la France doit être soit un préfixe, soit un suffixe. France Innovation, Business France, Campus France, France Compétences, Santé Publique France… avaient déjà tracé la voie d’une nomenclature stricte mettant au coeur des agences de l’Etat, la marque mère, unique.

Hegel l’affirmait, « il n y a pas de pensée véritable hors du langage”. Le choix des mots ou plutôt du mot - travail -  interroge forcément. Ici, ce qui surprend bien sûr c’est l’homophonie entre le substantif travail & l’impératif travaille.

A ce titre, « France Travail » surpasse en euphonie & en pertinence « Travail France », qui aurait été encore plus ambivalent sémantiquement. Rappelons que le travail est fortement connoté du fait de son étymologie (un instrument de torture à trois pieds)  : il est synonyme d’effort intense. Le travail de l’accouchement fait écho à cette souffrance dans le langage contemporain. Job était déjà dépassé, boulot, taf trop marqués de trivialité. Audiard y aurait préféré turbin, sans doute.

Quand on sait que l’oralité sera forte (« je suis inscrit à France Travail »), on ne peut douter qu’il y ait là le rêve de passer du voeu à la concrétisation performative (on se souvient du divin & fondateur Fiat lux de la Genèse) du voeu in real Life, à savoir, le plein … emploi.

Le Président l’avait dit en septembre 2018, à un horticulteur, au détour d’une conversation de rue, les employeurs (dans les hôtels, cafés, restaurants) recherchent « des gens qui sont prêts à travailler ». C’est ce travail, opérationnel, du terrain (« hop, au travail » ) dont il est question & naturellement pas celui, très XXème siècle, des Travailleurs, travailleuses ou pire, de la devise pétainiste.

Alors pourquoi un tel changement ? Pourquoi maintenant ? Pourquoi déjà ? Pour accompagner des objectifs chiffrés de résultats ? Donner du coeur à l’ouvrage des conseillers & booster leur performance ? Un re-baptême s’avère toujours multi-factoriel. Il peut avoir lieu suite à un changement d’actionnaires, en l’espèce, c’est toujours le peuple Français qui reste au board de la France. La France aurait-elle pivoté, telle une start-up faisant évoluer drastiquement son business model ? S’agirait-il, comme cela avait été le cas lors du rapprochement entre l’ANPE & l’Unédic sous le mandat de Nicolas Sarkozy, d’une fusion ? Enfin, serait-ce le point d’orgue d’une transformation interne de l’entreprise (osons le mot) voulue par un Président/CEO désireux d’imprimer sa marque ?

Pour Mallarmé, la poésie visait à « Donner un sens plus pur aux mots de la tribu ». Espérons que ce tri-syllabe et la vision sur le monde du travail qu’il embarque créent cet eldorado.

Tout nouveau, tout frais -

B.Better

Dans la grande famille des One to One, voici venu One to One B.Better, le rendez-vous qui allie business et innovations durables et responsables.

Un nouveau rendez-vous d’affaires One to One qui réunit les décideurs & décideuses du Ecommerce et du Retail pour inventer et encourager de nouvelles pratiques plus durables & responsables pour la transition des entreprises ! Première édition le 4 juin prochain.

Langue Vivante -

Phénomène phonétchique

La semaine dernière, le quotidien Libération publiait un article titré « Amandjine mange à la cantchine » dans lequel la socio-linguiste Maria Candea révélait une tendance de prononciation  assez subtile, et observée notamment chez les jeunes : l’affrication. À ne pas confondre avec l’africanisation, n’est-ce pas le Z ? Car si, on en convient, les termes sont proches, ils n’ont en revanche pas la même signification.

Affrication, avec deux f donc, vient du latin « affricare » qui veut dire « frotter contre » et décrit bien le phénomène phonétique à l’œuvre : lorsqu’une consonne est prononcée avec un bruit de friction plutôt que de manière sèche (les [t] en [tch] ou les les [d] en [dj]).

Alors forcément, et comme à chaque fois que l’on ose toucher à la langue française, le débat sur son déclin supposé a repris de plus belle. Pourtant, il s’agit d’une évolution linguistique ancienne et universelle, comme le précise Julie Neveux interviewée sur France Inter, car « le fait est qu'en matière de langue il est très rare qu'on invente ; on hérite d'un système, qu'on s’approprie ». À écouter juste ici.

Il s’en est passé des choses ! -

Namedrops

Sophie Gay, fondatrice de l’agence, lance sa newsletter bimensuelle « Namedrops », un concentré de curiosités qui attire son attention toutes les 2 semaines : (re)naming ou tendances langagières, Made In France ou venues d’ailleurs. Cette semaine, on y parle de CosMc, de projets fous, de fonts qui se renomment & du fabuleux monde d'ElonIA, à retrouver juste ici.

La distinction 2.0

Grand classique des sciences sociales, l’ouvrage La distinction du sociologue Pierre Bourdieu publié en 1979 s’attachait à démontrer comment les goûts culturels liés à la structure sociale fonctionnent comme des marqueurs de classe, et donc contribuent à la reproduction des inégalités. 45 ans plus tard, le journal Marianne se risque à une réactualisation de son fameux diagramme des positions sociales en y intégrant des objets culturels de notre époque, parmi eux, TPMP, l’astrologie, Zara, Jul, C dans l’air ou encore Twitter (euh, X, on veut dire !).

De ce graphique, le journal en a tiré quatre grands clusters : les bobos, les bourges, les dominés et les popus et propose ensuite à son lectorat un test en ligne pour découvrir à quelle famille il appartient. Et, si l’exercice du test est toujours amusant, on vous conseille surtout de jeter un oeil à l’analyse qu’en font Frédéric Lebaron, co-auteur du Dictionnaire international Bourdieu et Jean-Laurent Cassely, co-auteur de La France sous nos yeux, à retrouver ici.

Quand l’édito adoucit les moeurs sur la ligne 13

On vous parlait déjà dans la news de novembre du retour fracassant de l’édito. Cette fois-ci, c’est la RATP qui le confirme : l’édito revient en force. La marque s’allie au Média Positif pour diffuser dans ses couloirs des « capsules feel good » intégrées dans les boucles publicitaires. Au programme, et comme le nom l’indique, des informations positives : des progrès scientifiques et environnementaux, des initiatives sociales et entrepreneuriales ou des actualités culturelles et sportives. Pas sûr que le concept suffise à apaiser les esprits lors de la sixième panne de la semaine, mais la RATP reste positive, en tout cas dans son ton de voix !